Alors que sept collégiens de la banlieue de Toulouse, contaminés par la grippe A, sont toujours hospitalisés, de nombreuses voix s’élèvent contre une hospitalisation systématique qu’elles jugent excessive. C’est le cas de Patrick Berche, professeur de microbiologie à l’université Paris-V. Entretien.
Pensez-vous qu’en hospitalisant ces collégiens, on en fait trop?
Ce n’est pas la peine d’aller à l’hôpital quand on ne présente aucun symptôme de détresse respiratoire car la conséquence pourrait être un afflux massif de patients ayant simplement la grippe saisonnière. Nous n’avons pas des capacités d’accueil suffisantes dans les centres hospitaliers français. La solution consiste à se faire soigner à domicile et ainsi réduire les risques de contagion. La grippe A, c’est sérieux mais pas gravissime.
Est-ce que les mesures prises, jusqu’à présent, sont suffisantes?
Oui et l’adoption du plan « grippe A » va dans le bon sens. Ce plan prévoit la distribution des masques, l’administration du Tamiflu pour les personnes déjà contaminées ainsi que la vaccination des groupes de personnes à risques.
A l’heure actuelle, on peut dire que les autorités sanitaires ont pris toutes les mesures nécessaires pour contenir la pandémie. Mais personne n’est capable de prédire quelle sera la situation cet automne, au regard d’une grippe qui évolue et qui reviendra plus forte avec le froid.
Dans le cas d’une alerte pandémique en France, pensez-vous que nous serions préparés pour y faire face?
Nous serions prêts à condition qu’une coordination s’effectue entre les différents acteurs sanitaires.
Il faudrait d’abord assurer l’alimentation des populations qui pourraient être confinées chez elles. Dans le même temps, le passage au niveau 6 en France, devrait s’accompagner d’une vaccination des personnels de santé. Puis, avec la distribution des masques, il faudrait mettre à disposition le Tamiflu et ses 33 millions de traitements. Enfin, une fois le vaccin prêt, il faudra l’administrer à la population, ou du moins aux personnes les plus sensibles comme les adultes de plus de 65 ans ou les femmes enceintes.
C’est un nouveau virus très contagieux. Nous avons les moyens de le contenir mais la seule incertitude, aujourd’hui, c’est le taux de mortalité qui pourrait en résulter. Si on se réfère à son taux de mortalité officiel qui est de 0,4%, on peut alors estimer qu’on aura 4000 morts pour un million de cas en France.
Des mesures qui s’imposent
Pour Frédérique Verbois, médecin urgentiste au Centre hospitalier universitaire de Lyon, ces mesures sont au contaire nécessaires: « Je crois très sérieusement au risque d’une pandémie grippale. Pourquoi épargnerait-elle la France? Même si le virus H1N1 est moins virulent que le H5N1 [ou grippe aviaire] et que le nombre de morts sera beaucoup moins important que ce qui a été annoncé, il y aura beaucoup de malades. Je ne pense donc pas que les mesures prises soient excessives, au contraire. Tous les patients présentant les symptômes de la grippe A doivent être hospitalisés. La question qui reste ouverte est de savoir jusqu’à quand…
France : Grippe A – C`est sérieux mais pas gravissime
